mardi 1 octobre 2013

L'impossible écoute innocente.

Trois temps, valse morne, sobre, pas un cri, pas un mot plus haut que l'autre, Bertrand Cantat chuchote plus qu'il ne chante. Avec le bassiste Pascal Humbert, il forme un duo triste et bucolique : les deux hommes sont filmés dans un jardin inondé de lumière tandis que Cantat poursuit son chuchotement, la voix brisée, sans jamais avoir un regard pour la caméra et pour ceux qui l'écoutent de l'autre côté du miroir.

C'est la première fois, à ma connaissance, qu'un chanteur condamné pour meurtre et soupçonné d'avoir poussé sa femme au suicide revient devant son public. Qui ressent quoi ? Partout, les impressions fusent, chacun la sienne, en conscience : dégoût, fascination, malaise, joie des retrouvailles, indifférence. Moi, en tant qu'ancien fan amateur, qui, sans tomber dans l'outrance, a longtemps tenté d'être désinvolte et de n'avoir l'air de rien, je ne sais pas quoi penser ni ressentir.

J'aimerais m'en foutre, adorer ou haïr. Je suis perdu quelque part dans le triangle formé par ces trois points de la géographie humaine.

Ça commence par ces mots : « Tous les jours, on retourne la scène, juste fauve, au milieu de l'arène, on ne renonce pas, on essaie, de regarder droit dans le soleil. » Bordel, je n'écoute pas. Première strophe et première gamelle : pendant que Bertrand Cantat regarde droit dans le soleil, moi, je regarde droit dans Bertrand Cantat.

Malgré ou à cause de la simplicité travaillée de ce clip, Cantat, qu'il le veuille ou non, me force à le regarder. Impossible de ne pas scruter la contrition dans son visage, de soupeser sa bouille hirsute de vieux hérisson triste écrasé dix fois, cernes noirs, paupières alourdies, joues bouffies mangées par une barbe blanchie au menton, dents jaunies, la viande labourée par les années de taules, les clopes, la violence, la douleur, le temps. Ce n'est plus un chanteur, c'est un accident de voiture sur la voie opposée et je freine.

Et tandis que la chanson imprime son rythme lancinant, me voilà transformé en vérificateur officiel de la douleur d'autrui. Le petit contremaître de la souffrance et de la rédemption qui sommeillait s'en va poinçonner le ticket d'un œil inquisiteur. Alors ? Alors ça va, validé, il a pris cher, il porte les stigmates du malheur, et ça, c'est de la souffrance en bonne et due forme mon bon monsieur, tout est en ordre, le mec a une sale gueule, la morale est sauve.

A la fin du clip réalisé avec Amadou et Mariam, avec qui il a travaillé, le chanteur souriait et cette gaieté bonhomme avait provoqué chez moi un triple hashtag mental : #malaise, #OMG, #WTF. Ce n'est écrit dans aucun code pénal, mais un meurtrier perd le droit de sourire. Qu'importe si l'homme a déjà payé le prix de son crime, le peuple fâché lui rendra au moindre faux pas la monnaie de sa rage. Au moins la moitié du peuple.

Car il y a ceux qui s'enthousiasment sur les réseaux sociaux et ne cachent pas leur plaisir de retrouver les accents brisés du héraut des sombres héros. La même joie volontairement amnésique irradiait le public devant ses prestations aux Eurockéennes de Belfort ou ses apparitions au Zénith de Paris, avec les groupes Eiffel ou Shaka Ponk, comme si de rien n'était et cette ferveur était pour beaucoup encore plus insupportable qu'un sourire de Cantat en Afrique.

Moi, ex-fan transi refroidi, j'oscille entre l'entrain mesuré et la culpabilité rentrée d'aimer encore ce qu'il chante. Tant qu'il ne sourit pas, tant qu'aucun public ne manifeste sa joie, ça passe, limite, mais ça passe. Car Cantat est triste et la contrebasse crève les cœurs : « Tourne, tourne la terre, tout se dissout dans la lumière, l'acier et les ombres qui marchent à tes côtés... » Et la valse funéraire s'élance un peu plus haut, jolie, ciselée, toujours chuchotée, poétique, cryptique aussi, mais juste assez claire par instants pour que l'on saisisse l'essentiel. Ou que l'on croit l'avoir saisi.

C'est l'autre tapis dans lequel je prends une gamelle : après avoir sondé sa mine, je creuse ses mots pour y trouver Vilnius, Marie Trintignant, ou sa femme Kristina Rady qui s'est suicidée en 2010. Un instant et le soleil devient le symbole de l'espoir, l'instant d'après, celui de l'aveuglement. Je cherche, je décode. Sauf qu'il ne s'agit pas d'un jeu poétique et littéraire comme autrefois, à l'époque de Tostaky ou de 666.667 Club, mais plutôt la lecture, entre les lignes, du témoignage de l'acteur principal d'un fait divers, voire de deux, et de ce qu'il en reste plus de dix ans après, regrets, débris. #voyeurisme et #malaise.

Et même après trente écoutes, le diable est toujours là, à sa place, cramponné au texte et aux sons. Le long message de détresse de sa femme ondule, murène translucide, dans ces eaux menaçantes. Comment séparer la chanson de l'homme et l'homme de ses actes ? Comment écrire sur la chanson sans écrire sur l'homme ? Comment apprécier la chanson sans tomber dans l'empathie ? Sur les réseaux, les fans en appellent à Céline, à la compartimentation entre l'homme et son œuvre, mais Céline ne chantait pas en public et puis Céline est mort, comme François Villon ou Le Caravage.

Finalement, le châtiment de Bertrand Cantat, c'est peut-être simplement ça : l'impossible écoute innocente.

Quoi qu'il fredonne, on analysera ses mots sous le prisme de son crime et il sera condamné, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie. Évidemment par ceux qui n'admettent pas qu'il puisse « reprendre » sa vie après avoir pris celle de Marie Trintignant.

Mais aussi par ceux qui le défendent ; « Il a purgé sa peine », a lancé la ministre de la culture Aurélie Filippetti le jour du lancement de la chanson, le punaisant d'un mot sur la planche de liège de sa nouvelle condition : non plus celle de chanteur écorché vif, mais bien celle de chanteur-meurtrier-qui-a-payé-sa-dette, voire de chanteur-meurtrier-mais-qui-écrit-de-belles-chansons-quand-même.

Bah voilà. Il me faudra encore du temps avant de pouvoir réécouter Cantat sans tomber dans les ravins. Et il lui en faudra sûrement autant avant de cesser de s'aveugler dans le soleil pour nous regarder en face, nous, ses ex-fans, ses avocats, ses juges, ses procureurs et ses bourreaux.


46 commentaires:

  1. Bravo pour cet article. Effectivement, extrêmement difficile de regarder cette vidéo / écouter ce son de façon totalement neutre.
    Par contre, je crois que coquille il y a sur 666.667 CLUB (et non Code).
    Bonne journée.

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  2. On aimerait ne rien penser, juste garder vive encore la rage joyeuse de nos 14, 15, 16 ans quand nous écoutions Noir Désir nous miauler dans les oreilles, quand enfin nous avions l'impression de nous reconnaître, quand enfin nous avions l'impression d'avoir une musique à nous, rien qu'à nous.
    Il est fin, ce texte, bien écrit, balancé, l'oeuvre d'un qui a connu cette rage joyeuse, assurément, et qui en veut, comme nous, à Cantat de l'avoir abimée. Mais pourquoi en veut-on aussi un peu à Kolia de l'avoir écrit, ce texte?

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  3. Emmanuel Talayrach2 octobre 2013 à 00:02

    Il nous regardera, « nous, ses ex-fans, ses avocats, ses juges, ses procureurs et ses bourreaux », il nous regardera bientôt. Son instinct de fauve le dit quand il lance ce regard d'une demi-seconde entre 2'50 et 2'51 comme on lance un défi.
    Beaux textes — le tien, le sien — d'incertitudes innocentes et possibles. Je reste à l'écoute...

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  4. T'as vraiment résumé le truc... Je me sens pareil, i'm lost...

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  5. Malgré (....ou grâce à...?) des évènements rudes, durs, (in)explicables, malgrè cette tâche (rude euphémisme..) et bien que je regrette il y a 10 ans, je ne peux m'empêcher de penser: Pu...!!! Jamais entendu autant de poésie et incarné aussi intésement et si profondément, avec douleur, chagrin, haine-amour... toute la dimension émotionnelle et spirituelle d'un être, sa faiblesse et sa force, la déchirure en chacun de nous, qu'on le sache ou pas, qu'on l'accepte ou pas.. elles regardent aussi droit dans le soleil.. les fleurs du mal.... je n'ais aucun avis sur la question du quiquequoidontoucomment... mais je sais une chose: rien ni personne ne m'a jamais autant mis à nu que Noir Dez et Cantat, j'ai entendu chanter de moi, comment ...?

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  6. Cette écoute innocente impossible, je l'avais expérimentée une première fois avec sa reprise d'Aucun express de Bashung.
    J'ai longé ton corps, épousé ses méandres, je me suis emporté...

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    1. Je n'ai étrangement aucun problème avec tout ce qu'il a chanté "avant". L'innocence est préservée mais c'est du formol qui la tient debout. Et cette chanson me tient à coeur. C'est à ma connaissance la seule chanson poétique qui parle de sodomie. Prouesse d'écriture.

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  7. Je n'ai jamais aimé B. Cantat ni Noir Désir, ses (leurs) mots, sa poésie je les trouve dans la facilité du temps, orientés, commerciaux, teintés d’une dimension toute faite dans la dimension. Toujours calculé. Je distingue l'artiste de ses actes ( Celine - Heidegger - Picasso - Polanski etc ) dans le sens ou cela ne m’empêche pas de juger l’œuvre et l'homme ; même si la question est complexe et tout est mêlé. Ce retour pose cette vraie question et c’est intéressant. Il a le droit de s'exprimer, et heureusement. J'ai regardé ce clip et je ne vois q’une manipulation d'un manipulateur, un paumé qui se ment à lui-même. Une récitation, c'est normal qu'il soit ainsi non ? Une très bonne mise en scène. Je ne perçois aucune sincérité. J'ai envie de dire "et alors"?. J'aurais été séduit s'il avait livré une vraie tentative sur son/ses véritables histoires. C'est un banal type, il se promène tristement sur sa triste ballade. Il est très fort pour cela mais c’est d’une banalité... Mais surement tout cela parce que je n’aime pas l’homme dans toutes ses dimensions.

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  8. Je crois qu'après tant d'exposition judiciaire, médiatique, la pudeur voudrait qu'il ne s'affiche plus vraiment champ caméra. J'adore Cantat, je suis touchée par sa poésie et sa musique, mais il faut avoir l'honnêteté de reconnaître que non, rien n'est plus comme avant, que son image est définitivement transfigurée et que ce n'est pas une chanson, si belle soit elle, en forme de contrition qui effacera ou fera redevenir celui qu'il a été. Si tout cela m'était arrivé, je crois que j'en aurais été profondément et définitivement changée..

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  9. C'est dit comme il faut, avec justesse, avec pudeur et attentions sans en faire trop. Et ça traduit très bien le malaise que je ressens aussi. C'est un joli titre mais on y cherche trop de choses, forcément, et on interprête aussi son absence de regard caméra, et ses rides, et sa barbe de 5 jours blanchie... Merci d'avoir sur mettre des mots sur ce malaise.

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  10. Voilà, tu as tout résumé ..toute l'ambivalence de Cantat ...bel article !

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  11. Bof, l'article est finalement mieux que l'album de Cantat. Quand on a une conscience on sait comment aborder le personnage et ça depuis le premier coup de poing qu'il a porté à M Trintignant. 4 ans de prison pour avoir tuer une femme. La vie ne vaut pas grand chose. S'il a changé de facies c'est plus certainement du aux médicaments et à l'alcool qu'à la taule qu'il a juste survolé. Quant à ses remords, à ce stade, c'est juste de la projection, s'il en avait réellement sur ce qu'il a commis, il n'oserait pas revenir sur scène et il se serait suicidé.

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    1. Et donc la seule action possible pour un criminel est le suicide ? Lorsque l'on a commis une faute (si grave soit-elle), il n'y a point de salut, point d'avenir en dehors de la repentance et de l'attente passive de la mort, attente qu'on ferait d'ailleurs bien d'abréger soi-même ? Etrange conception de la vie et de la justice.
      Cantat est un artiste, c'est son métier. S'il avait ete plombier (par exemple), aurait-on hurlé au scandale s'il s'était remis au travail ?
      A-t-on tant de musiciens de talent en France qu'on puisse se priver de la contribution d'un des plus brillants d'entre eux ? A vous de voir, pour ma part tant que ce qu'il produit est de qualité, je n'ai pas de probleme avec ça. Pour ma part je n'ai jamais aimé l'homme et toujours apprecié sa musique, les "évènements" de Vilnius n'ont rien changé.

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    2. Le choix n'est pas binaire, il y a troisième option : changer pour un boulot non-médiatique.

      Combiné à l'argent qu'il continue à gagner avec les droits de ses albums précédents, il peut en vivre, même si on se doute que ça ne sera pas simple non plus au quotidien. Revers de la médaille d'une carrière publique.

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  12. Et si TOI tu fermais ta gueule ?
    Toi tu sais rien.
    Toi t'as jamais vécu des situations similaires où BC et MT se sont retrouvés un soir après quelques excès.
    D'ailleurs t'as jamais rien vécu à te lire.
    Mais ça te permet de juger apparemment.
    Où sera ton châtiment, à Toi ?

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    1. "t'as jamais vécu des situations similaires où BC et MT se sont retrouvés un soir après quelques excès"

      Pour paraphraser Séguéla, si à 40 ans, t'as pas frappé une femme au point de la tuer, t'as raté ta vie.

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    2. Mon châtiment ? Discuter avec vous de Cantat sur une aire d'autoroute ou dans un blog.

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  13. Très bon article, sans passion, et qui permet de comprendre un peu les déferlements de sentiments, d'un côté comme de l'autre, et de se sentir moins mal à l'aise avec ça.
    Ce que j'ai lu de mieux sur le retour de Cantat, depuis le retour de Cantat :)
    Merci beaucoup

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  14. Merci pour l'article. Son retour est un peu calme. J'ai apprécié son passage sur Palabra mi Amor, et j'espère qu'il remettra de la patate dans son ouvrage. Mais cette voix reste bel et bien ancrée dans ma tête. Il est qui il est, j'aimerai pas avoir sa vie. Pour le jugement, à Dieu (ou qui que vous souhaitiez) vat. Mais reviens chanter ta rage mec.. Joue la mélancolique si tu veux, mais continue de pointer du doigt et de déchirer les œillères à coup de verbe. Je file réécouter les anciens tiens..

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  15. Un cortège se met en route, une kyrielle d'assassins ...

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  16. Peut-être que la seule manière de négocier avec ça, c'est qu'on l'entende chanter et rien que ça. Disparaitre, qu'il n'y ait que la voix. Je ne supporte plus de voir son visage.

    Peut-être qu'on commencerait à pouvoir détacher l'artiste de l'homme. Parce que j'y tiens, moi, à cette frontière. C'est un principe fondateur.

    Mais rien à faire, cette exposition physique d'un désastre, ça ne passe pas. Pourtant, je suis restée dans la compassion après le meurtre - car il s'agit bien d'un meurtre, la compassion n'empêche pas le jugement - de Marie trintignant, attachée que j'étais à des souvenirs bordelais. Je trouvais tout à fait normal qu'il aille en prison, qu'il "paye", entendons-nous bien. Le suicide de Kristina Rady m'a heurtée. Maîtrisant assez bien le concept (très à la mode) du pervers narcissique, il y avait cette alarme rouge qui résonnait dans ma tête. C'était trop mais une seconde de doute était encore là.

    Le message téléphonique m'a achevée. Les parents de Kristina Rady...

    Je ne peux plus. Mes limites sont là.

    Je n'ai pas commenté (ou quasi) la sortie de cet album. Ton billet me fait sortir de ma réserve. (il est formidable d'ailleurs). Mais je ne vois que ça comme issue supportable : que le visage de Bertrand Cantat s'efface, qu'il devienne presque un fantôme et qu'il ne reste que la voix et des chansons.

    Peut-être, peut-être qu'à ce moment-là, j'arriverai à oublier l'homme.

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    1. Tu sens comme ça vibre ? Nous dansons exactement sur la même corde, la même longueur d'onde.

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    2. Faut que t'arrêtes de regarder des pubs pr la 4G Kolia ^^

      (mais oui )

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    3. Et puis j'étais bourré quand j'ai écrit ça. Huhu.

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    4. Ha ben voilà, tout s'explique mouhaha ! (mais je te chambrais mon poulet hein ? ) Et dis donc, c'est un festival en dessous ma parole ^^ #commentaires

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  17. Jamais vu aucune pub pour la 4G.

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  18. excellent article...moi qui te croyais illettré, quelle surprise ! (hein ?)
    TM

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  19. Je suis ex fan aussi, et c'est exactement ce que je pense aussi, enfin c'est ce que je penserais si j'avais vu son clip. Car je n' ai pas envie du tout d'apprécier et de ressentir un mélange vaseux de culpabilité, de mépris, et d'amour, c'est trop malsain. J'ai écouté ses titres en boucle quand j'étais même pas ado, j'ai jamais pu le voir en concert parce que j'étais trop jeune alors. Le voir en concert etait alors un des buts de ma vie futur. Un deuil parmi d'autres. Et puis j'étais aussi fan des films de Marie Trintignant, "série noir" surtout. Et sa femme avait l'air d'être sacrément courageuse. C'est insupportable qu'elle ait été étouffée comme ça par quelqu'un qui a besoin d'être le seul et l'unique objet d'amour, mais qui apparemment ne s'encombre pas de trop de fidélité. Je peux pas m'empêcher de croire que le fait d'avoir des fans, des gens qui vous idolatrent et sont prêts à tout pardonner et à s'abaisser devant votre génie, ça rend fou, je suis sure qu'il y a une responsabilité collective dans ces drames, quelque chose de l'ordre de l'adoration qui a empeché leur entourage ne serait-ce que de voir la détresse de sa femme. Je n'écouterai meme pas sa musique, car il y a des millions d'aures choses à decouvrir sur cette terre, des tas de musiciens tres valeureux qui n'auront jamais le centieme de son succes et de son argent.

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  20. En écho (pas si lointain que ça) : paragraphe 2 et suivants http://bit.ly/JCewTX

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  21. Je trouve ce texte outrancié et barge. Trintignant, moi, je m'en fiche. Fille de bourgeois, je m'en fiche de son histoire. Y a bien plus grave, autrement plus grave, notamment tous ces gens qui meurts aux larges des côtes italiennes. Mais, sûr, eux c'est pas des Pipols, c'est des anonymes. Quanta quanta il a fait de la taule, que je sache. La famille Trintignant personne la connais. Kanta non plus on le connait pas. Tout ça c'est des réac épidermiques produit par les merdias. Faut sortir de ce cercle viscieux monté de toute pièce par les merdias. Il chante bien, le Kanta ? Oui ? Alors ok, moi j'écoute. J'écoute le chanteur. Le reste je ne veux même pas le savoir. Qu'est-ce que vous voulez ? Que des mecs pures et sympa sous tous les angles ? C'est raté. On vie dans un monde de merde. Faut faire avec.

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    1. Je trouve votre commentaire aussi barge que mon texte pour des raisons diamétralement opposées.

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  22. « Et puis j'étais bourré quand j'ai écrit ça. Huhu. »

    Merci d'avoir eu la spontanéité et la raison de ne pas laisser ces impressions se disperser après le verre de trop, de préciser votre ressenti, cette impression agréable ou pénible qui pèse sur cette chanson mélancolique... Jamais un artiste n'aura alimenté chez moi autant de sentiments différents au gré de ses chansons : de la joie, de la révolte, de la rage, de la tristesse... Les chansons sont souvent plus harmonieuses que la vie, et à peu près rien d'autre.

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  23. "nous, ses ex-fans, ses avocats, ses juges, ses procureurs et ses bourreaux."

    Eh bien ! Heureusement qu'il reste du monde en dehors de cette étrange horde.
    Libre à vous de persister, dix années durant, à décortiquer, analyser, juger, mais que ne pouvez-vous le faire dans l'intimité ?
    Un titre, un artiste. Un déluge de commentaires, de jugements, et si peu qui s'attachent au titre, à l'artiste justement.
    Le "retour impossible" c'est devenu une véritable aubaine pour les journalistes, faut-il vraiment en rajouter ?

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    1. Dans l'intimité ? Aubaine ? Euh. C'est la première fois que j'écris sur ce thème, j'ai écrit ce petit truc dans mon petit coin, je l'ai posté sur ce petit blog privé vidé de ces autres textes, blog que vous êtes libre de ne pas consulter et qui n'est sponsorisé par personne (Nike et Barclays ont essayé mais j'ai refusé leurs ponts d'or). De quelle aubaine parlez-vous ? oO
      Non, en gros, vous me demandez de ne pas écrire sur ce sujet parce que ça vous agace. Sauf que, comme vous le dites, en effet, je suis libre d'écrire sur ce que je veux, quand ça me plaît, surtout dans cet espace personnel que consulte qui veut. Vous êtes libre de ne pas le lire, d'être en désaccord si vous lisez, de le dire, même de m'insulter. Ne me demandez pas de ne pas écrire quand ça me chante.

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  24. Avec « Droit dans le soleil » on ressent la mélancolie d'un homme écorché qui veut utiliser ce qu'il fait de mieux pour exprimer un message. Est-ce quelque chose qu’il rabâché entre ses 4 murs de prison ? Est-ce une demande de pardon/un repenti pour avoir le droit de revenir à la chanson ?
    En tout cas, il me manque ce débordement d’énergie qui caractérisait noirdez et la jeunesse/l’insouciance de Bertrand Cantat à l’époque.
    « Horizons » ne peut et ne doit pas être un tas de valses sombres tournées vers le passé : le futur attend et il mérite d’être vécu à 200%.

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  25. Trés beau texte, merci.

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  26. Céline, Cantat : compartimenter l'Homme et son œuvre ? Impossible. Tout excuser ? Encore moins. Alors ? Alors comprendre, saisir la beauté au milieu des décombres, de la noirceur de l'âme humaine. Car l'une se nourrit de l'autre, toujours.

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    1. Je dis comprendre. Entendre : "tâcher de". Evidemment.

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  27. J'ai lu avec attention chaque mon de ce billet qui est, de très loin, ce que j'ai préféré lire ces dernières semaines sur ce thème. Tu es le premier que je lis qui n'impose pas, qui ose avouer son incapacité et son malaise à prendre clairement position, et qui, en plus, dissèque ces sentiments avec une précision captivante... J'ai lu ici pas mal de mots qui pourraient se poser sur mes propres pensées pour les décrire...Je croyais faire partie des sobres amateurs persuadés que "il a purgé sa peine", je m'aperçois que je l'ai ressenti aussi, ce malaise inévitable, cette impossible innocence, lorsqu'il m'a susurré ces mots droits dans le soleil... Je crois qu'une part de moi, celle qui a tant vibré pour Marlène et Tostaky, voudrait la croire encore possible, voudrait séparer cliniquement l'oeuvre et l'homme, l'art et la vie personnelle... Mais une autre part l'en empêche et fait les liens... Et ainsi, toutes ces parts et moi-même atteignons ensemble ta conclusion : impossible innocence.

    Ravie de découvrir une plume aussi agréable, soit dit en passant.

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  28. Je n'ai jamais été un "fan", mais j'ai aimé les chansons de Noir Désir dès la première écoute de " Au sombres héros de l'amer" (je ne suis même pas certain qu'elle porte ce titre... bref).

    Et le meurtre de Marie Trintignant a soulevé pas mal de questions sans réponses.

    La lecture d'un texte politique de Léo Thiers-Vidal, (« Culpabilité personnelle et responsabilité collective: 
    Le meurtre de Marie Trintignant par Bertrand Cantat comme aboutissement d’un processus collectif », lisible ici : http://1libertaire.free.fr/LeoThiersVidal05.html ) m'a permis de commencer de prendre de la distance avec mon propre ressenti, et d'essayer de comprendre, de donner du sens ce qui était en jeu à la fois dans la mort d'une femme sous les coups de son compagnon, dans la réaction des fans de ce dernier, et dans ma propre réaction.

    Il est assurément improbable de proposer ici aux ex-fans un peu paumés d'un chanteur, même et surtout « engagé », la lecture d'un tel texte de critique radicale, qui plus est féministe. La confrontation avec une analyse qui montre la continuité de comportement et de condition entre l'homme qui frappe sa compagne au point de la tuer et chacun de ceux qui, tout en ne commettant pas de meurtre sur la personne de leurs amies, copines, compagnes, épouses, ne relèvent pas moins de la même masculinité, peut être un tout petit peu plus inconfortable. Il me semble de loin préférable de parvenir à accéder à cet inconfort là.

    Les attitudes simplistes que l'on a pu lire depuis dix ans, qu'elles renvoient un meurtrier à ses gestes pour mieux se tenir à distance du caractère dramatique de la question des rapports de sexe et de leurs impensés, que, parce que de gauche et médiatique, il se retrouve tout particulièrement incarner; ou qu'elles prétendent passer l'éponge sur le passé au nom de la Justice et du Droit, et d'une rédemption en partie double, d'une approche comptable et individuelle des crimes et des peines, me semblent relever d'un même et commun désir, noir celui-là, très noir, d'ombre et de déni, au cœur de la société et de son sexisme.
    La gène que nous ressentons dit assez crûment que nous avons bien plus que nous aimerions l'admettre en commun avec un homme qui a tué une femme, et que nous ne pouvons reléguer au rang de monstre de fait-divers. Le plaisir que nous avons eu à l'écouter nous interdit cette facilité, que nous nous autoriserions avec un anonyme.
    Les femmes avec qui nous vivons méritent que nous ne nous ne prétendions en aucun cas de nous satisfaire de littérature, qu'en aucun cas nous ne nous payions de mots : et que nous interrogions sans ménagement ce commun.

    Si l'écriture poétique est une manière efficace pour les vivants de sublimer leurs émotions douloureuses, et je ne doute pas un seul instant que celles de Cantat puissent l'être, commencer d'interroger le comportement des hommes, de tous les hommes, y compris et d'abord celui de ceux qui, comme moi, pourraient être tentés de se sentir innocents face à lui, que me semble une démarche tôt ou tard inévitable, et d'autant plus urgente que toutes les femmes le subissent, et que certaines en meurent.

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    1. D'accord dans l'ensemble, même si je ne vois pas pourquoi s'arrêtez aux violences des hommes faites aux femmes. En tant qu'être humain, je me sens responsable de toutes les violences que les humains se font entre eux, quel que soit le sexe du bourreau et de sa victime, depuis toujours. Relisez donc La tête coupable de Gary, il en parle très bien.

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  29. Ce texte résume parfaitement l'ambivalence naissante entre l'homme, ce qu'il écrit, et ce qu'il a fait.
    Lorsque j'ai appris son retour sur scène, je n'étais pas à l'aise. Probablement parce que ses poésies passées avec Noir Désir se trouvent encore sur mes étagères d'étudiantes. Peut-être aussi parce que je ne savais plus où placer la limite entre l'homme public et sa vie privée ; alors même que j'avais toujours pensé ne pas vouloir tenir compte de ce qu'il pouvait arriver dans l'intimité de quelque personnalité. J'étais perdue. Je me suis sentie coupable de vouloir encore écouter Cantat, et d'aimer encore ses proses et sa voix malgré l'horreur de ses actes.
    Tout n'est pas tout noir ou tout blanc, j'étais dans le gris. Le gris des émotions, Le gris de l'indécis face à tout ce qui était balancé ou reçu en pleine gueule de la part des autres (journalistes, amis, famille, etc.).
    Le jugement de Cantat ne semble plus avoir de limite. À ce qu'il a fait, s'ajoute ce qu'il écrit mais aussi ceux qui écrivent sur lui (à tout ce qui est écrit sur lui, flammes majestueuses ou descentes aux enfers), mais également à ceux qui l'écoutaient et qui ne l'écoutent plus, à ce qui l'écoutaient et l'écoutent encore, à ceux qui ne l'on jamais écouté et ceux qui l'on écouté et l'écoute sans savoir s'il ne se rendent pas coupable d'un crime non répertorié dans le code pénal.
    Probablement faudra-t-il du temps avant de ne plus ressentir ce malaise mêlant poésie actuelle et soleils passés. Du temps pour accepter de ne plus se sentir coupable d'écouter et d'apprécier. Apprécier vraiment, sans se questionner, sans goûts amers...
    Il semblera toujours plus difficile de lire ou d'écouter un homme coupable que sa victime, considérant que son acte ne lui donne plus droit à la parole, à quelque parole que ce soit. Comme gravé au couteau, tatoué à jamais, marqué au fer ; d'une seconde pour l'éternité...
    Merci pour cet écrit qui rend mon brouillard un peu moins brumeux. Je crois que le temps et mes questionnements feront le reste.
    Cerise

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